Comment nomme-t-on les espèces de dinosaures?

En résumé:
Ce sont les paléontologues lors de la description scientifique d'un nouveau dinosaure qui peuvent en choisir le nom, mais ils doivent respecter des règles internationales.

La nomenclature correspond à l'ensemble des règles qui s'appliquent à la dénomination scientifique des noms des animaux et végétaux, qu'ils soient vivants ou fossiles. Ces règles permettent de s'assurer de la stabilité et de la validité des noms scientifiques partout dans le monde. Les noms scientifiques sont donc universels, ce qui facilite la communication. Ces règles ne s'appliquent pas aux noms utilisés dans le langage de tous les jours (noms vernaculaires).

Un système géré par des institutions indépendantes

Pour les plantes, la gestion des noms scientifiques, c'est-à-dire le code de nomenclature, est géré par le Congrès international de botanique, qui publie le Code International de Nomenclature pour les algues, les champignons et les plantes (CIN).

Pour les animaux et donc les dinosaures, c'est la Commission internationale de nomenclature zoologique (en anglais: International Commission on Zoological Nomenclature — ICZN) qui publie le Code international de nomenclature zoologique. Il en existe deux versions officielles, une en anglais et l'autre en français, équivalentes et ayant le même statut.

Ces deux codes contiennent les mêmes règles de base pour définir correctement un nom scientifique, mais sont indépendants. Deux organismes peuvent donc porter le même nom, s'il s'agit d'un animal et d'un végétal. Par exemple, Prunella est le nom de genre d'un oiseau et d'une plante.

Depuis l'an 2000, un autre code indépendant est en cours de développement, le Code international de nomenclature phylogénétique, ou PhyloCode, mais encore peu utilisé et surtout conçu pour réguler la dénomination des clades (groupes monophylétiques), la gestion des noms d'espèces est laissée aux deux autres codes.

Un système hérité du 18e siècle

Les bases de la nomenclature remontent au célèbre scientifique Carl von Linné au 18e siècle. On parle de dénomination binomiale (en botanique) ou binominale (en zoologie), c'est-à-dire que le nom scientifique est composé de deux parties:

  • un nom de genre, qui doit être écrit en italique, la première lettre en majuscule et le reste en minuscule, par exemple: Tyrannosaurus.
  • un nom d'espèce, qui est toujours écrit en minuscule et qui s'accorde avec le nom de genre. Le nom de l'espèce ne peut pas être utilisé seul, il faut le faire précéder du nom de genre, par exemple: Tyrannosaurus rex, où rex est le nom de l'espèce du genre Tyrannosaurus. Donc T. rex est la forme abrégée correcte du nom de ce dinosaure, alors que T-rex ou d'autres variantes ne le sont pas.

On peut parfois rajouter d'autres parties au nom scientifique, par exemple pour désigner une sous-espèce.

Lors de la première description d'un nouveau dinosaure, le paléontologue peut choisir le nom qu'il veut, s'il est compatible avec toutes ces règles. Le nom peut être construit avec des mots désignant une caractéristique du dinosaure (par exemple Triceratops signifie tête à trois cornes), de la localité où il a été découvert (par exemple Gobipteryx signifie aile [du désert] de Gobi), pour rendre hommage à une personnalité (par exemple Byronosaurus jaffei signifie lézard de Byron Jaffe), etc. Les termes utilisés sont souvent d'origine grecque, latine ou de la langue locale, ce qui donne aux noms scientifiques des combinaisons parfois compliquées à prononcer.

Cependant, le nom scientifique doit être indépendant de la langue d'origine. C'est pour cela que tous les noms scientifiques sont latinisés et que les caractères spéciaux sont interdits: les diacritiques (accents, tréma, cédille), les ligatures (æ et œ) et les tirets. Les noms de genre doivent être au nominatif singulier et les noms d'espèces au nominatif singulier ou au génitif s'ils sont basés sur un nom propre.

Lorsqu'ils sont francisés, les noms ne sont plus soumis à ces règles, par exemple: le tyrannosaure. Mais on a alors une confusion possible avec le nom des autres groupes au-dessus du genre: les tyrannosaures peuvent par exemple faire référence aux représentants du genre Tyrannosaurus, à la sous-famille des tyrannosaurinés (nom scientifique: Tyrannosaurinae), à la famille des tyrannosauridés (Tyrannosauridae) ou aux tyrannosauroïdes (Tyrannosauroidea), soit un groupe qui peut contenir plusieurs dizaines d'espèces.

On peut également ajouter des précisions sur la validité du nom scientifique:

  • nomen nudum (nom nu): le nom est connu, mais pas encore scientifiquement validé.
  • nomen oblitum (nom oublié): le nom n'a pas été utilisé scientifiquement depuis 50 ans après sa publication.
  • nomen dubium (nom douteux): le nom n'est pas reconnu comme valide.

Scène du crétacé
Reconstitution d'une scène du crétacé dans ce qui était les États-Unis (Montana) il y a environ 80 millions d'années. Au premier plan: les oiseaux Ichthyornis dispar, des ptérosaures en vol et le crocodile Deinosuchus. À l'arrière-plan passe un troupeau de Kritosaurus.
Artiste: Douglas Henderson.

Des règles pour éviter les conflits

Pour identifier complètement une espèce, on doit également ajouter le nom de l'auteur de sa première description scientifique (celui qui a défini ce nom) et l'année de la publication, par exemple: Tyrannosaurus rex Osborn, 1905.

Selon le principe d'antériorité, seule la plus ancienne description scientifique est reconnue comme étant valide. Si un même nom est utilisé pour des animaux différents, le premier décrit aura donc la priorité sur les suivants, qui devront être renommés.

Le principe d'antériorité est également utilisé dans les cas de synonymie. Par exemple, des ossements ont été d'abord décrits sous deux noms différents, mais une révision du matériel démontre par la suite qu'il s'agit d'une même espèce. Dans ce cas, tous les ossements porteront le nom de la plus ancienne espèce décrite et l'espèce la plus récente sera considérée comme synonyme junior. Par exemple, Brontosaurus Marsh, 1879 a été reconnu synonyme de Apatosaurus Marsh, 1877 en 1903, ce qui a été contesté en 2015, le sujet fait encore débat chez les paléontologues.

Une exception existe cependant au principe d'antériorité. En effet, si le nom plus récent est passé dans l'usage, il pourra être conservé. On peut citer par exemple le cas du célèbre Tyrannosaurus, qui aurait ainsi dû être renommé en Manospondylus, une espèce qui avait été décrite sur du matériel très fragmentaire en 1892.

Les types

La description d'une espèce doit s'accompagner d'un type, c'est-à-dire d'un spécimen de référence, qui doit obligatoirement être conservé dans une collection librement accessible à toute la communauté scientifique, donc soit dans un muséum d'histoire naturelle, soit dans une collection universitaire. Ainsi, un dinosaure qui correspondrait à une nouvelle espèce et qui serait détenu par un propriétaire le gardant dans sa collection personnelle, ne pourrait pas être décrit scientifiquement comme une espèce valide.

L'holotype est le spécimen de référence désigné comme tel lors de la description scientifique, les paratypes sont les autres spécimens utilisés dans la description. Ainsi, c'est principalement par comparaison avec les holotypes déjà référencés qu'un paléontologue peut savoir si les ossements qu'il vient de découvrir peuvent être considérés comme une nouvelle espèce ou s'ils font partie d'une espèce déjà décrite.

Struthiomimus et Corythosaurus
Dessin de Struthiomimus et Corythosaurus par BrokenMachine86.

Illustration du titre:
Reconstitution d'une famille de dinosaures Caudipteryx. Artiste: Emily Willoughby.

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