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== Un prédateur puissant … == | == Un prédateur puissant … == |
Dernière version du 24 juin 2014 à 21:14
Fiche descriptive
¤ Etymologie du nom: "Lézard de Majunga (l’ancien nom de la province de Mahajanga)"
¤ Position dans la classification: Ceratosauria - Abelisauroidea - Abelisauridae - Majungasaurinae
¤ Eres géologiques: Crétacé supérieur (Maastrichtien inférieur : ~ 70 millions d’années).
¤ Taille estimée: 6 ou 7 m de long pour le propriétaire du crâne le mieux conservé (FMNH PR 2100), certains spécimens fragmentaires représentent des individus de plus grandes tailles.
¤ Poids estimé:
¤ Régime alimentaire: carnivore
¤ Répartition géographique: Formation Maevarano (Membre d’Anembalemba), province de Mahajanga : région de Berivotra, Madagascar
¤ Découvert en: 1895
Les différentes espèces
- Majungasaurus crenatissimus (Depéret, C., 1896).
L’adjectif spécifique crenatissimus vient du Latin crenatus, denté et issimus, beaucoup, nombreux ; en référence aux nombreuses serrassions s’étendant sur toute la longueur des deux bords tranchant des dents (Depéret, 1896b)
Synonymes junior :
Megalosaurus crenatissimus,Depéret, 1896
Dryptosaurus crenatissimus, Depéret & Savornin, 1928
Majungatholus atopus, Sues & Taquet, 1979
Inventaire des fossiles retrouvés
- MNHN.MAJ 1 Néotype, un dentaire droit incomplet d’un spécimen subadulte.
- Majungasaurus est représenté par au moins quatre crânes, trois squelettes postcrâniens partiels (lesquels sont complémentaires), de nombreux ossements crâniens et postcrâniens isolés (représentant plus d’une vingtaine d’individus) et des milliers de dents isolées. Parmi les spécimens les plus significatifs figurent : FMNH PH 2008 un prémaxillaire droit ; MNHN.MAJ 4 un toit crânien incluant une partie des frontaux fusionnés (avec le processus en forme de corne), les pariétaux, le processus postérieur du lacrymal droit, le sphenethmoïde et les laterosphenoïdes ; FMNH PR 2100 un crâne désarticulé superbement bien conservé et presque complet (auquel ne manque que le prémaxillaire gauche, le ptérygoïde droit, l’ectoptérygoïde droit, les deux epipterygoïdes, les deux vomers et les deux columelles) associé à 26 vertèbres caudales et 18 chevrons ; FMNH PR 2278 un squelette désarticulé composé de nombreux éléments crâniens (les deux prémaxillaires, les deux maxillaires, le jugal gauche, le quadratojugal gauche, l’ectoptérygoïde gauche, le carré gauche, le surangulaire gauche, l’angulaire gauche, le préarticulaire gauche et l’articulaire gauche) et postcrâniens (deux arcs neuraux partiels de vertèbres cervicales, trois vertèbres dorsales fragmentaires, une vertèbres caudale fragmentaire, le scapulocoracoïde gauche, un ilion gauche partiel, le fémur gauche, les tibia gauche et droit partiels, les fibula gauche et droite partielles, l’astragalocalcaneum gauche, les métatarsiens II-IV gauche, les phalanges II-1 et IV-2 du pied droit, et les phalanges IV-2 et IV-3 du pied gauche) d’un grand spécimen presque adulte ; UA 8678 un squelette désarticulé composé de quelques éléments crâniens (un splénial gauche, un préarticulaire gauche, un surangulaire droit et un squamosal droit) et surtout postcrâniens (23 vertèbres présacrées, 13 côtes cervicales, 14 côtes dorsales, un sacrum partiel, cinq vertèbres caudales proximales, une vertèbre caudale médiane, le premier chevron et les deux ilia) ; UA 8709 un crâne désarticulé presque complet mais mal conservé (composé des maxillaires, les nasaux, les frontaux, les jugaux, les lacrymaux, le postorbitaire droit, le squamosal droit, les pterygoïdes, les ectoptérygoïdes, le palatin droit, la boîte crânienne incomplète et les deux dentaires), FMNH PR 2836 un squelette presque complet et largement articulé auquel ne manque que les membres postérieurs et une partie du membre antérieur droit (radius, ulna, carpiens et métacarpiens). Seul le membre antérieur gauche complet de ce spécimen a été décrit par Burch et Carrano (2012).
Historique des découvertes
De 1895 aux années 1950 : une maigre moisson
- Les premiers fossiles de ce dinosaure (deux dents, une phalange unguéale et trois vertèbres incomplètes : deux sacrales et une caudale) furent découverts à Madagascar en 1895 par un militaire français, l’Adjudant Landillon. Celui-ci récolta en fait ces fossiles pour son supérieur hiérarchique, le Dr Félix Salèles qui était également physicien. À cette époque, la France entreprit la colonisation de Madagascar et Salèles reçu pour mission de construire un hôpital temporaire dans la région de Majunga, au nord-ouest de l’île. Salèles reconnu le potentiel paléontologique de cette région, mais n’ayant pas le temps de récolter lui-même des fossiles il ordonna à Landillon d’effectuer des reconnaissances géologiques et paléontologiques à sa place. Landillon envoya ses découvertes (lesquelles incluent aussi des restes de sauropodes) au grand paléontologue français de l’époque, Charles Depéret (Krause et al., 2007). Ce dernier attribua les restes de théropode à une nouvelle espèce de Megalosaurus (un genre connu que par quelques débris du Jurassique moyen d’Angleterre) qu’il nomma Megalosaurus crenatissimus (Depéret, 1896). Plus tard, en 1928, Depéret et Savornin placèrent cette espèce dans le genre Dryptosaurus, un animal du Crétacé supérieur de la côte est des USA connu par des restes très fragmentaires. Megalosaurus et Dryptosaurus ont longtemps été des genres "fourre-tout" auxquels ont a attribués des restes de théropodes (généralement fragmentaires) provenant de divers continents et de strates géologiques ayant parfois 100 millions d’années d’écart. Il est bien sûr impossible qu’un même genre de dinosaure ait existé pendant une aussi longue période et la plupart des espèces attribuées à ces deux genres ont depuis été reversées dans d’autres genres. Concernant le théropode malgache, le premier à le distinguer des genres Megalosaurus et Dryptosaurus fut le paléontologue français René Lavocat qui, dans les années 1950, entreprit de nouvelles fouilles dans la région de Majunga. En 1955, il décrivit un dentaire de théropode (MNHN.MAJ 1) et des dents associées (une seule étant encore en place dans une alvéole du dentaire) identiques à celles décrites par Depéret. Cette mandibule diffère de celles connues chez Megalosaurus et Dryptosaurus, aussi Lavocat plaça le théropode malgache dans un nouveau genre qu’il nomma Majungasaurus, dont les relations de parentés avec d’autres théropodes restèrent toutefois longtemps mystérieuses.
Les années 1990 et 2000 : les découvertes du Mahajanga Basin Project
- Il fallut attendre les années 1990 et 2000 pour que la connaissance de ce dinosaure progresse de manière spectaculaire. En 1993, débuta un programme de recherche sur le long terme consacré aux faunes du Crétacé supérieur du nord-ouest de Madagascar (appelé Mahajanga Basin Project), co-organisé par l’Université de Stony Brook (New York) et l’Université d’Antananarivo. A ce jour, ces institutions ont menées neuf expéditions dans la région de Berivotra (1993, 1995, 1996, 1998, 1999, 2001, 2003, 2005, 2007) avec comme résultats la découverte d’une quantité considérable de fossiles de nombreux groupes de vertébrés. Parmi les restes de théropodes, la première expédition en 1993, découvrit des centaines de dents isolées ainsi qu’un prémaxillaire (FMNH PH 2008). Sampson et al. (1996) démontrèrent que les dents isolées, ainsi que celles portées par ce prémaxillaire, étaient identiques à celles attribuées à Majungasaurus crenatissimus. Ils notèrent aussi que ce prémaxillaire présente des ressemblances avec certains spécimens trouvés en Inde et qui appartiennent à la famille des Abelisauridae. Sampson et al. supposèrent donc que ce prémaxillaire malgache appartenait probablement au Majungasaurus et que ce dernier devait être un Abelisauridae. La seconde expédition en 1996 découvrit un crâne désarticulé de théropode (FMNH PR 2100) superbement bien conservé et presque complet dont les mandibules portent des dents identiques à celles retrouvées isolément par centaines et attribuées à Majungasaurus. Les prémaxillaires de ce spécimen présentent une morphologie et des caractères identiques au prémaxillaire isolé décrit par Sampson et al., confirmant ainsi l’appartenance de ce dernier au genre Majungasaurus. Ce crâne présente également une particularité anatomique observée chez un autre fossile incomplet de Madagascar et qui fut attribué à un tout autre type de dinosaure. En effet, le crâne de ce théropode montre des frontaux fusionnés se terminant par une protubérance en forme de dôme. Cette structure fut également trouvée chez un autre crâne partiel (MNHN.MAJ 4) qui fut décrit par Sues et Taquet en 1979 sous le nom de Majungatholus atopus. D’après cette structure en forme de dôme sur le sommet du crâne, Sues et Taquet considéraient l’animal comme un dinosaure herbivore de la famille des Pachycephalosauridae, dont il était le premier représentant trouvé dans l’hémisphère sud. Le nouveau crâne découvert en 1996 prouva que les fossiles de Majungatholus n’étaient pas ceux d’un pachycéphalosaure, mais appartenaient à un théropode de la famille des Abelisauridae. En 1998, Sampson et al. signalèrent d’une part que Depéret ne désigna pas d’holotype pour le théropode malgache, et d’autre part que le spécimen type de Majungasaurus crenatissimus (le dentaire décrit par Lavocat) ne présentait pas de caractères diagnostiques. En conséquence ils considérèrent M. crenatissimus comme un nomen dubium et déclarèrent que Majungatholus atopus devait être le nom valide de ce théropode. Toutefois, en 2007, Krause et al. démontrèrent dans un imposant mémoire consacré à ce théropode, que le spécimen type de Majungasaurus possède bien des caractères diagnostiques et que le nom de Majungasaurus crenatissimus est bien le nom valide du grand prédateur malgache. En 2009, Carrano et al. proposèrent que le dentaire décrit par Lavocat devienne le néotype de l’espèce, ce qui fut accepté en 2011 par l’International Commission on Zoological Nomenclature. Les expéditions de 2003 et 2005 ont livrés plusieurs spécimens particulièrement bien conservés de Majungasaurus dont la plupart n’ont pas encore fait l’objet d’une publication. Une exception est la description en 2012 par Burch et Carrano du premier membre antérieur complet de cette espèce (spécimen FMNH PR 2836). Le reste du squelette de cet individu, ainsi que d’autres spécimens seront décrits dans les années à venir.
Caractères propres à ce dinosaure
Diagnose
- Selon Krause et al., Majungasaurus est caractérisé par des nasaux très épais lesquels sont fortement pneumatisés via un grand foramen bilatéral ; des processus nasaux des prémaxillaires gauche et droit séparés par une fine lame osseuse du nasal ; des maxillaires portant 17 alvéoles ; des frontaux arrondis antérieurement plutôt que formant une double encoche ; des frontaux se terminant par un processus en forme de dôme ou de corne, à la surface sculptée et plus ou moins pneumatisée ; une fosse médiane prononcée sur la crête sagittale (ou frontopariétale) ; des dentaires portant 17 alvéoles, et qui présentent une portion post-alvéolaire très réduite, et un sulcus latéral occupant une position ventrale ; des dents portant des sulci interdenticulaires très développées ; un atlas ayant de longues épipophyses falciformes ; des centra des vertèbres dorsales antérieures ayant des faces articulaires dorsoventralement allongées ; des vertèbres cervicales médiane dont les bordures antérieures et postérieures des processus transverses sont parallèle en vue latérale ; et des vertèbres dorsales et caudales ayant des épines neurales élargies (transversalement et antéropostérieurement). Krause et al. (2007) avaient également inclus comme caractéristiques la présence de côtes cervicales pneumatisées et à l’extrémité distale bifurquées, mais Carrano et al. (2008) ont retirés ces éléments de la diagnose de Majungasaurus car ces caractères sont également présents chez Carnotaurus.
Le crâne
- Comme la plupart des Abélisauridés, Majungasaurus possède un crâne relativement haut, court et large, se terminant par un museau arrondi. Des caractéristiques différentes de celles d’autres théropodes qui ont tendance à avoir des crânes plus longs et comprimés latéralement, et qui se terminent par un museau étroit. Même par rapport à d’autres abélisauridés, le museau de Majungasaurus apparaît plus large et plus arrondi. Les deux nasaux de Majungasaurus sont hautement dérivés, ils sont largement fusionnés l’un à l’autre formant une seule unité, de telle sorte qu’il n’est plus possible de distinguer une suture médiane entre les deux os. Ces nasaux fusionnés peuvent être divisés en deux régions distinctes, une grande portion rostrale dorsalement convexe, et une plus petite portion caudale plus large en forme de selle. Ces nasaux sont également très épais dorsoventralement et renferment une grande chambre pneumatique, laquelle constitue 45 % du volume des deux éléments. D’autres éléments crâniens sont pneumatisés tels que les lacrymaux et les frontaux. Ces derniers font également parties des éléments les plus caractéristiques du crâne de Majungasaurus en formant une bosse en forme de dôme ou de corne sur le sommet du crâne. Les différents spécimens connus montrent de nombreuses variations dans la morphologie (plus ou moins ornementés) et la taille de cette corne, qui sont probablement des exemples de variations individuelles, ontogénétiques et probablement liés aussi à un dimorphisme sexuel (parmi les individus matures, certains spécimens ont une bosse relativement basse, alors que chez d’autres elle est relativement haute, Sampson et Witmer, 2007). La surface des os crâniens est ornée de nombreuses rugosités, lesquelles sont plus particulièrement prononcées sur les nasaux, les lacrymaux et une partie des postorbitaires, suggérant la présente d’un épais tissu kératinisé. Comme les autres abélisauridés, l’arrière crâne se termine par une crête nucale très développée qui devait servir de soutien à une puissante musculature cervicale.
Le squelette postcrânien
- La présence d’une puissante musculature cervicale est également attestée par l’anatomie des vertèbres cervicales, lesquelles sont pourvues d’épipophyses hypertrophiées (O’Connor, 2007). Les côtes cervicales sont bifurquées à leurs extrémités distales et sont hautement pneumatisées de même que toutes les vertèbres précaudales (à l’exception de l’atlas). Les membres postérieurs sont également puissants mais relativement courts et trapus, particulièrement le tibia. Comme chez les autres abélisauridés dont les membres antérieurs sont connus, ceux de Majungasaurus présentent aussi la combinaison étrange d’un scapulocoracoïde (les os de l’épaule) très développé auquel venait se rattacher un bras dont la région antébrachiale (sous l’humérus) est atrophiée. Le radius et l’ulna ne représentent ainsi qu’un quart de la longueur de l’humérus. La main compte quatre doigts, lesquels ne se composent que d’un court métacarpien et d’une ou deux phalanges (respectivement chez les doigts I et IV et chez les doigts II et III). Les proportions de l’humérus sont plus proches de celles d’Aucasaurus que de Carnotaurus. En revanche, le radius et l’ulna de Majungasaurus sont de même taille que chez Carnotaurus, et sont proportionnellement plus court que chez Aucasaurus (Burch et Carrano, 2012).
Un abélisauridé de grande taille
- Le crâne le plus complet et le mieux conservé de ce théropode (FMNH PR 2100) mesure 57 cm de long, et appartient à un animal mesurant 6 ou 7 m de long. Ce spécimen ne représente pas la taille maximale de Majungasaurus. En effet, d’autres spécimens moins complets, appartiennent à des individus de plus grandes tailles. Par exemple, MNHN.MAJ 4 (le crâne partiel qui fut attribué à un pachycéphalosaure) est environ 25 % plus grand que FMNH PR 2100. Le crâne complet de ce spécimen devait atteindre 70 cm de long suggérant une longueur corporelle de 8 m et plus (Sampson et Witmer, 2007).
Paléoécologie
- Majungasaurus vivait dans un environnement semi-aride et saisonnier où alternait périodes de pluies et de sécheresses importantes (Rogers et al., 2007). Il habitait de vastes plaines inondables, mais il fréquentait aussi les larges canaux sablonneux qui drainaient les hautes terres de Madagascar. Ces cours d’eau peu profonds étaient peuplés d’un faune riche et diversifiée d’animaux aquatiques et semi aquatiques dont des poissons, des grenouilles (dont la forme géante Beelzebufo), des tortues, et plusieurs espèces de crocodyliformes dont l’étonnant Simosuchus qui était herbivore et d’autres qui étaient plus classiquement des prédateurs comme le petit Araripesuchus et les grands Mahajangasuchus et Miadanasuchus. On trouvait également des oiseaux (Vorona) et des mammifères (Lavanify). Majungasaurus cohabitait également avec d’autres dinosaures, parmi lesquels deux espèces de titanosaures (Rapetosaurus et Vahiny), ainsi qu’avec les petits théropodes Masiakasaurus et Rahonavis.
Un prédateur puissant …
- Majungasaurus était le plus grand prédateur de son environnement et les seuls grands herbivores qui cohabitaient avec lui étaient des sauropodes tel le titanosaure Rapetosaurus. Il est probable que Majungasaurus et d’autres abélisauridés se soient spécialisés dans la capture des titanosaures, des proies lentes mais puissantes. En effet, selon Sampson et Witmer (2007), Majungasaurus possède plusieurs caractéristiques crâniennes et postcrâniennes qui renseignent sur le type de prédation pratiqué par l’animal. Majungasaurus possède un crâne, un cou et des membres postérieurs particulièrement robustes. Son crâne est compact, court et large, et ses dents sont relativement courtes et ne pouvaient occasionner que des morsures peu profondes. Les dents de devant (sur les prémaxillaires) sont plus robustes que les dents plus postérieures et devaient servir de point d’ancrage lors de la morsure. Toutes ces caractéristiques anatomiques suggèrent que les mâchoires et les dents de Majungasaurus n’étaient pas faites pour transpercer profondément ses victimes mais plutôt pour saisir et occasionner des morsures prolongées. La puissance de rétraction du cou à la fin de chaque morsure occasionnait des blessures massives à ses victimes. La robustesse du crâne permettaient d’encaisser les chocs, les membres postérieurs courts et trapus garantissaient un meilleur équilibre en abaissant le centre de gravité de l’animal, une autre caractéristique utile lors d’un "combat" prolongé avec une proie robuste qui se débat. Les proportions des membres postérieurs de Majungasaurus montrent donc clairement que ce théropode n’était pas un sprinter (contrairement à d’autres abélisauridés comme Carnotaurus, Aucasaurus et Skorpiovenator), mais il n’avait pas besoin d’être rapide pour rattraper un titanosaure. Alors que Majungasaurus n’auraient pas pu se déplacer aussi vite que d’autres théropodes de taille semblable, il n’aurait eu aucun mal à suivre des sauropodes, des animaux assez lents. Avec la robustesse de son squelette et les proportions de ses membres, il semble que Majungasaurus ait sacrifié la vitesse pour la puissance. Cette morphologie se retrouve aussi chez certains abélisauridés indiens (tel Rajasaurus) et chez au moins un abélisaure d’Argentine (Ekrixinatosaurus).
… mais aussi un cannibale
- En 2003, Rogers et al. ont signalés des marques de morsures sur divers ossements de dinosaures provenant de plusieurs sites de la Formation Maevarano. Ces os appartiennent aussi bien à des dinosaures herbivores comme le titanosaure Rapetosaurus qu’à plusieurs spécimens de Majungasaurus (dont FMNH PR 2100 et UA 8678 qui présentent des traces de morsures sur les chevrons pour le premier et sur les côtes pour le second). L’analyse des marques de morsures sur tous ces ossements a révélée qu’elles étaient l’œuvre d’autres Majungasaurus, démontrant ainsi que cette espèce ne se nourrissait pas uniquement de dinosaures herbivores mais pratiquait aussi le cannibalisme. Mais ce que l’on ignore, c’est si Majungasaurus tuait lui-même des congénères ou s’il pratiquait seulement un cannibalisme opportuniste en se nourrissant de congénère déjà mort. On ignore également s’il s’agissait là d’un comportement fréquent chez cet abélisauride ou si au contraire, c’était un fait exceptionnel lié par exemple à certaines conditions environnementales extrêmes (période de disette). La plupart des sites à dinosaures de la Formation Maevarano correspondent justement à des accumulations de carcasses de dinosaures (dont Majungasaurus) et d’autres animaux, probablement morts de faim et de soif suite à d’intenses périodes de sécheresse récurrentes (Rogers et al., 2007). Pendant ces périodes difficiles, les accumulations de cadavres des victimes de la sécheresse fournissaient des repas faciles et abondants pour les Majungasaurus les plus forts ou les plus chanceux.
Traumatismes et maladies
- Farke et O’Connor (2007) ont décrits plusieurs restes pathologiques de Majungasaurus appartenant à au moins quatre individus. Cela inclut une phalange montrant une expansion médiolatérale de la diaphyse d’origine inconnu ; une vertèbre dorsale avec une petite exostose, une vertèbre caudale montrant une probable ossification non expliquée des ligaments vertébraux, et une série de vertèbres caudale distale montrant que l’extrémité de la queue d’un spécimen (FMNH PR 2294) fut tronquée. Pour Farke et O’Connor (2007), deux scénarios étiologiques alternatifs sont possible pour expliquer la pathologie observée chez FMNH PR 2294. Une première hypothèse est que la fin de la queue fut perdue de façon traumatique, suivie par l’apparition secondaire d’une ostéomyélite suppurée. La seconde hypothèse est qu’une ostéomyélite préexistante (qu’elle soit liée à un traumatisme, une infection systémique, ou une autre cause) ait finalement abouti à la perte de l’extrémité distale de la queue.
Classification
- Majungasaurus fut considérés par certains auteurs (Wilson et al., 2003 ; Sereno et al., 2004) comme un très proche parent du Carnotaurus argentin. Notamment en raison de la présence de cornes chez les deux espèces. Mais diverses études récentes ont révélées que ces deux Abelisauridae n’étaient pas étroitement apparentés. Carrano et Sampson (2008) ont ainsi trouvés que Majungasaurus était plus proche des Abelisauridés indiens, (avec lesquels il forme un clade que les auteurs n’ont pas nommés), que des Abelisauridés sud-américains. Une conclusion également partagée par Tortosa et al. (2014) qui ont placés Majungasaurus dans le nouveau clade des Majungasaurinae, lequel rassemble également des formes indiennes (tel Rajasaurus) et européennes (tel Arcovenator) qui lui sont très similaire.
Publications
- Depéret, C. 1896a. Sur l’existence de Dinosauriens, Sauropodes et Théropodes dans le Crétacé supérieur de Madagascar. Comptes Rendus de l’Académie des Sciences (Paris), Série II 122: 483–485.
- Depéret, C. 1896b. Note sur les Dinosauriens Sauropodes et Théropodes du Crétacé supérieur de Madagascar. Bulletin de la Société Géologique de France, 3e série 24:176–194.
- Depéret, C. and Savornin J. 1928. La faune de reptiles et de poissons albiens de Timimoun (Sahara algérien). Bulletin de la Société Géologique de France, 4e série 27:257–265.
- Lavocat, R. 1955. Sur une portion de mandibule de Théropode provenant du Crétacé supérieur de Madagascar. Bulletin du Muséum National d’Histoire Naturelle, 2e série 27:256 259.
- Sues, H.-D., and P. Taquet. 1979. A pachycephalosaurid dinosaur from Madagascar and a Laurasia-Gondwanaland connection in the Cretaceous. Nature 279:633–635.
- Sampson, S. D., D. W. Krause, P. Dodson, and C. A. Forster. 1996. The premaxilla of Majungasaurus (Dinosauria: Theropoda), with implications for Gondwanan paleobiogeography. Journal of Vertebrate Paleontology 16:601–605.
- Sampson, S. D., L. M. Witmer, C. A. Forster, D. W. Krause, P. M. O’Connor, P. Dodson, and F. Ravoavy. 1998. Predatory dinosaurs remains from Madagascar: implications for the Cretaceous biogeography of Gondwana. Science 280:1048–1051.
- Rogers, R. R., D. W. Krause, and K. Curry Rogers. 2003. Cannibalism in the Madagascan dinosaur Majungatholus atopus. Nature 422: 515–518.
- Wilson, J. A., Sereno, P. C., Srivastava, S., Bhatt, D. K., Khosla, A. & Sahni, A. (2003). A new abelisaurid (Dinosauria, Theropoda) from the Lameta Formation (Cretaceous, Maastrichtian) of India. Contributions from the Museum of Paleontology, University of Michigan 31: 1–42.
- Sereno, P. C., Wilson, J. A. & Conrad, J. L. , (2004). New dinosaurs link southern landmasses in the Mid-Cretaceous. Proceedings: Biological Sciences: p.1471-2954.
- Krause, D. W., S. D. Sampson, M. T. Carrano, and P. M. O’Connor. 2007. Overview of the history of discovery, taxonomy, phylogeny, and biogeography of Majungasaurus crenatissimus (Theropoda: Abelisauridae) from the Late Cretaceous of Madagascar; pp. 1–20 in S. D. Sampson and D. W. Krause (eds.), Majungasaurus crenatissimus from the Late Cretaceous of Madagascar. Society of Vertebrate Paleontology Memoir 8.
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- O’Connor, P. M., 2007. The postcranial axial skeleton of Majungasaurus crenatissimus (Theropoda: Abelisauridae) from the Late Cretaceous of Madagascar; pp. 127–162 in S. D. Sampson and D. W. Krause (eds.), Majungasaurus crenatissimus (Theropoda: Abelisauridae) from the Late Cretaceous of Madagascar. Society of Vertebrate Paleontology Memoir 8.
- Carrano, M. T. 2007. The appendicular skeleton of Majungasaurus crenatissimus (Theropoda: Abelisauridae) from the Late Cretaceous of Madagascar; pp. 163–179 in S. D. Sampson and D. W. Krause (eds.), Majungasaurus crenatissimus from the Late Cretaceous of Madagascar. Society of Vertebrate Paleontology Memoir 8.
- Farke, A. A., and P. M. O’Connor. 2007. Pathology in Majungasaurus crenatissimus (Theropoda: Abelisauridae) from the Late Cretaceous of Madagascar; pp. 180–184 in S. D. Sampson and D. W. Krause (eds.), Majungasaurus crenatissimus from the Late Cretaceous ofMadagascar. Society of Vertebrate Paleontology Memoir 8.
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