Fiche descriptive

¤ Etymologie du nom: "De Normannia, le nom Latin de la Normandie et du Grec sauros, lézard."

¤ Position dans la classification: Titanosauria

¤ Eres géologiques: Crétacé inférieur (Albien inférieur-moyen : ~ 110 millions d’années).

¤ Taille estimée: Probablement près de 20 m de long.

¤ Poids estimé:

¤ Régime alimentaire: herbivore

¤ Répartition géographique: France, Seine-Maritime : Le Havre (Bléville),

¤ Découvert en: 1990

Normanniasaurus genceyi, vertèbre caudale antérieure en vue latérale gauche. D’après Buffetaut, 1995.



Les différentes espèces

L’espèce honore Pierre Gencey, le découvreur du spécimen.


Inventaire des fossiles retrouvés

Normanniasaurus genceyi, vertèbre caudale médiane en vue latérale gauche. D’après Buffetaut, 1995.
  • Holotype, un squelette partiel incluant des fragments de vertèbres présacrées (MHNH-2013.2.1.8, 2013.2.1.9), un sacrum partiel (MHNH-2013.2.1.12), une vertèbre caudale antérieure (MHNH-2013.2.1.7), une vertèbre caudale médiane (MHNH-2013.2.1.2), une scapula droite partielle (MHNH-2013.2.1.12),, une partie des deux ilia (MHNH-2013.2.1.3 et 2013.2.1.4), et des ischia (MHNH-2013.2.1.5 et 2013.2.1.6), l’extrémité proximale d’un fémur (MHNH-2013.2.1.11), et une portion proximale d’une fibula (MHNH-2013.2.1.10).
  • Spécimen référé : un centrum de vertèbre caudale postérieure provenant d’un niveau stratigraphique légèrement plus récent.


Découverte

  • Normanniasaurus est un titanosaure dont le squelette fragmentaire fut découvert en 1990 par un chercheur amateur, Pierre Gencey, qui remarqua divers ossements au sein de blocs de conglomérats tombés des falaises de Bléville sur la commune du Havre. Ce spécimen fut brièvement mentionné par le paléontologue Eric Buffetaut dans son livre Dinosaures de France (paru en 1995), dans lequel deux des vertèbres du sauropode furent illustrées. L’animal est représenté par un os de l’épaule, deux fragments de vertèbres présacrées, un morceau du sacrum, deux vertèbres de la queue, des éléments du bassin, et des fragments d’un membre postérieur. Bien qu’incomplets, ces restes sont toutefois suffisants pour reconnaître une nouvelle espèce de dinosaure, laquelle ne fut décrite qu’en 2013.


Caractéristiques

Normanniasaurus genceyi, vertèbre caudale antérieure en vues latérale gauche (A1), latérale droite (A2), antérieure (A3), postérieure (A4), dorsale (A5) et ventrale (A6) ; vertèbre caudale médiane en vues latérale gauche (B1), latérale droite (B2), antérieure (B3), postérieure (B4), dorsale (B5) et ventrale (B6). D’après Le Loeuff et al., 2013.
  • Les vertèbres présacrées de Normanniasaurus ne sont représentées que par des fragments d’arcs neuraux (des prézygapophyses) pourvues d’hyposphene. Un fragment de sacrum très érodé est constitué de trois centra dépourvus de pleurocoeles. La face ventrale du sacrum n’est pas aplatie, ce dernier ayant une section en forme de V. L’unique vertèbre caudale antérieure connue de Normanniasaurus est fortement procoele et se distingue par la présence d’un foramen ouvert juste devant la postzygapophyse. Elle possède également de profondes fosses postspinale et préspinale, et son arc neural présente une épine neurale axialement allongée. La seule autre vertèbre caudale connue, une caudale médiane, est quand à elle légèrement amphicoele avec un arc neural situé antérieurement. La scapula porte une crête épaisse sur sa face ventrale, et une autre plus fine sur sa face dorsale. L’ilion droit, qui est le plus complet, conserve le pédoncule pubien et une petite partie de la lame antérolatéralement élargi. En vue distale le pédoncule pubien est en forme de virgule. La partie proximale de l'ischion droit est conservée, ainsi qu'un fragment de l’ischion gauche. Le pédoncule iliaque est robuste; le pédoncule pubien et la partie distale de l'os ne sont pas conservés.


Un titanosaure basal

Normanniasaurus genceyi, ilion droit en vues médiale (A), dorsale (B) et ventrale (C). D’après Le Loeuff et al., 2013.
  • La présence de l’articulation hyposphene-hypantrum sur les vertèbres présacrées (comme chez Andesaurus et Epachthosaurus), ainsi que la coexistence dans la série caudale de vertèbres antérieures fortement procoeles et de vertèbres médianes amphicoeles, indique que Normanniasaurus est un titanosaure relativement primitif. En effet, les titanosaures dérivés, les Eutitanosauria, ont tous perdus le complexe hyposphene-hypantrum, et chez ces formes, la procoelie s’étend à toutes les vertèbres caudales.
  • Avec la découverte de Normanniasaurus, les titanosaures basaux sont donc maintenant connus non seulement en Amérique du sud (Andesaurus et Epachthosaurus) et en Afrique (Malawisaurus), mais aussi en Europe. Des spécimens très fragmentaires trouvés dans l’Albien d’autres régions françaises, ainsi qu’en Angleterre, indiquent l’existence d’une faune de sauropodes relativement diversifiée à la fin du Crétacé inférieur en Europe, avec un probable Eutitanosauria, des titanosaures basaux comme Normanniasaurus, et d’autres sauropodes d’affinités incertaines. Normanniasaurus ne constitue qu’un élément de cette faune (le spécimen le moins fragmentaire) qui s’éteindra longtemps avant le Campanien, période durant laquelle les titanosaures plus évoluées que sont les Eutitanosauria, deviendrons le groupe de sauropodes dominant en Europe. Il reste bien des incertitudes sur le fait de savoir si ces titanosaures basaux ont données naissances à des Eutitanosauria dans leurs régions respectives, ou si au contraire, ils furent tous remplacés par une radiation de titanosaures plus évolués. D’après Le Loeuff et al. (2013), l’existence probable d’Eutitanosauria dans les dépôts du Crétacé inférieur d’Angleterre soutiendrait la seconde hypothèse.


Paléogéographie

  • La découverte de Normanniasaurus est importante car il s’agit de l’un des très rares dinosaures d’Europe datant de l’Albien, le dernier étage du Crétacé inférieur. Pendant une grande partie du Mésozoïque, l’Europe fut un archipel à la géographie changeante. Et l’étage Albien fut l’intervalle de temps où le niveau des océans fut le plus élevé. Les terres émergées européennes étaient donc à cette époque encore plus rares que pour les autres étages géologiques. C’est pourquoi, pour la période considérée, les dépôts marins l’emportent largement sur les dépôts continentaux (où l’on trouve habituellement et logiquement les restes de dinosaures), et cela explique aussi pourquoi les dinosaures albiens d’Europe sont aussi rares. Il arrivait toutefois que des cadavres d’animaux terrestres comme les dinosaures soient transportés par des fleuves jusqu’à la mer, et c’est justement le cas des restes du Normanniasaurus. Ses ossements furent trouvés dans la Formation des Poudingues Ferrugineux qui représentent des sédiments marins côtiers. Pour Le Loeuff et al., Normanniasaurus vivait sur une île dont le territoire englobait les actuelles Bretagne et Basse-Normandie, et dont les rivages les plus proches se trouvaient environ à une soixantaine de kilomètres à l’ouest du site de découverte. Les fossiles de Normanniasaurus constituent le troisième squelette partiel de dinosaure trouvé dans les dépôts marins albiens de France, les deux autres étant l’allosauroïde Erectopus de Lorraine et l’abélisauroïde Genusaurus de Provence.


Publications

  • Powell, J. E. 1990. Epachthosaurus sciuttoi (gen. et sp. nov.) un dinosaurio sauropodo del Cretácico de Patagonia (Provincia de Chubut, Argentina). V Congreso Argentino de Paleontologia y Bioestratigrafia, Tucumán, Actas 1:123–128.
  • Salgado, L., and R. Martínez. 1993. Relaciones filogeneticas de los titanosauridos basales Andesaurus delgadoi y Epachthosaurus sp. Ameghiniana 30:339–340.
  • Buffetaut, E. 1995. Dinosaures de France. Orléans: Editions du BRGM, 1-144.
  • Martínez, R.; Giménez, O.; Rodríguez, J.; Luna, M. & Lamanna, M. 2004. An articulated specimen of the basal Titanosaurian (Dinosauria: Saurópoda) Epachthosaurus sciuttoi from the Early Late Cretaceous Bajo Barreal Formation of Chubut Province, Argentina. Journal of Vertebrate Paleontology, 24(1):107-120.
  • Le Loeuff, J., Suteethorn, S. & Buffetaut, E. (2013) A new sauropod dinosaur from the Albian of Le Havre (Normandy, France). Oryctos 10: 23-30.