Sur l'identité d'espèce tricé-toro :
D'abord il serait peut-être judicieux de citer ses sources (pour moi ici le wiki anglais sur le torosaure).
Cette hypothèse ne reste qu'une hypothèse, fort douteuse en l'occurrence.
Elle a été réfutée par Longrich en 2012 sur trois critères :
1/ Y a-t-il des individus différents retrouvés sur un même site dans la même strate ?
Non !
2/ Les tricés sont-ils "vraiment" plus jeunes que les Toros ?
Non seulement rien n'est établi, mais il semblerait bien que certains individus des "deux espèces" aient eu des âges comparables, voir même des tricés plus agés que certains toros. Donc carrément plutôt non !
3/ A-t-on des formes transitoires (d'un âge transitoire) entre les deux formes ?
Non !... De plus, les différences entre les différentes formes squelettiques semblent clairement exclure une possible évolution hypothétique de l'une vers l'autre. les faiblesses d'épaisseur de la collerette chez le tricé ne correspondent absolument pas à la localisation ultérieure des trous dans celle du toros. ; l'épaisseur relative du pourtour des collerettes sont quasi incompatibles ; etc., etc..
En gros cette hypothèse est à classer dans les nombreuses lubies ayant émaillées l'histoire de la conceptualisation du règne dinosaurien.
Alors deux choses :
a/ Sur la localisation des différents taxons : A moins de retrouver des fossiles exactement dans le même coin et dans la même strate, il y a fort à parier que deux squelettes d'apparences suffissamment similaires pour envisager la même identité, soient en fait différents, pour peu que les deux sites puissent avoir un million d'année de décalage (souvent la datation admet facilement un à plusieurs millions d'années de marge d'erreur).
Rappelons qu'Homo Sapien n'est apparu que voici 300 000 ans (et Néanderthal voici 450 000 ans), qu'un million d'année est donc considérable dans la dynamique évolutionnelle. Nous ne sommes même pas sûrs d'être génétiquement compatibles avec les premiers Homo Sapiens. Idem pour le coelacanthe (poisson dit fossile) et ses ancètres : Il y a des millions d'années d'évolution du système immunitaire (ayant eu à s'adapter à la diversification des microbes et autres bactéries et virus : l'apparentement fossilifère n'est pas tout).
Bref, à moins de circonstances exceptionnelles (même site même strate - et encore ? Par exemple si une crue soudaine ensevelit des lionnes disputant sa proie à un léopard, ce ne voudra pas dire que leurs fossiles retrouvés au même endroit révèleraient un dismorphisme d'une même espèce), il est douteux de vouloir attribuer deux fossiles quasi identiques à une même espèce, tout au plus peut-on les classer dans une "famille rapprochée", voir très rapprochée pourquoi pas.
b/ A contrario si l'on observe les différences morphologiques entre humains actuels : noirs-asiatiques, hommes-femmes, enfants-adultes, et plus encore dans la nature les dismorphismes juvéniles-adultes et sexuels (cervidés, arrachnoïdes, etc. ...), TOUTES les hypothèses sur des possibles dismorphismes de genre entre des fossiles sensiblement différents sont possiblement autorisées, MAIS... dans la limite des restrictions antérieures (fossiles retrouvés sur un même site et même strate : la célèbre formation de Morisson s'étale sur plusieurs millions d'années entre le bas et le haut de la strate, où on ne retrouve pas les mêmes fossiles en haut et en bas... par exemple).
En dehors de cela, toute assimilation dismorphique à un même genre entre fossiles différents est irrémédiablement douteuse à priori. Ce n'est pas nécessairent intrinsèquement faux en soi, mais quasi indémontrable. On peut alors parler de "supputation raisonnable", à prendre avec précaution donc. En tout cas, ce genre de supputation doit être méticuleusement soumise à des épreuves de falsificabilité (mise en évidence des incompatibilités potentielles entre hypothèse et réalités observables, comme Longrich).
Enfin, n'oublions pas le caractère humain dans le monde de la paléonthologie (comme ailleurs !).
Certains paléonthologues ont envie de sortir du lot en émettant des hypothèses hardies. Plus l'hypothèse est iconoclaste plus elle risque de faire parler d'eux, et donc certains n'hésiteront pas à débrider totalement leur imagination pour ce faire (la paréïdolie consiste à voir de pseudo-formes significatives dans les nuages par exemple). Sont-ils pour autant des charlatants ? Oui et non : Ils peuvent être sincères dans leur démarche, mais à partir du moment où ils cessent d'adopter une attitude vraiment critique envers leurs hypothèses (les confronter méticuleusement aux contradictions factuelles), on peut dire qu'ils font preuve de "légèreté contre-productive".
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Edité le 15/09/2021 à 09:57 par NomDouteux
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Edité le 15/09/2021 à 10:03 par NomDouteux
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Edité le 15/09/2021 à 10:06 par NomDouteux